La Meute des Loulous

La Meute des Loulous

vendredi 11 avril 2014

Ca y est, après plusieurs années de réflexion, on a fini par faire le pas qui sépare deux mondes, celui de l'école et celui de la liberté. Luna, ce soir, quitte les bancs de l'école pour une nouvelle aventure. Voilà la lettre que j'ai remise aux institutrices, tout à l'heure, la joie au cœur:

Pour Hélène, Carine, Valérie, Sandrine et Sandrine,

"Cueille ta vie, avant qu'elle soit emportée par le vent
Cueille ta vie, avant qu'elle soit abîmée par le temps
Cueille ta vie, tiens-la fort et ne la laisse pas s'enfermer dans le rang
Ne la laisse pas s'envoler loin de tes rêves cueille-là dès maintenant
                                                                     Keny Arkana



Pour Luna, la décision de quitter l'école a fini de mûrir à la veille de la reprise des cours, à la fin des dernières vacances, face à un coucher de soleil sur la montagne.
"Maman, je ne veux pas retourner à l'école..."
La profondeur de l'instant contrastait avec cette autre réalité, celle de l'école. C'était une affirmation réfléchie, pesée, posée, juste. Nous avons décidé d'écouter sa voix, -sa voie!- tout en gardant en tête toutes les possibilités d'adaptation face à ce choix.
Alors, pour nous, une nouvelle aventure commence.
Je vous remercie toutes d'avoir veillé sur Luna, et pour les apprentissages qu'elle a puisé en vous. J'aimerai partager avec vous quelques citations, en cadeau:

"Bien des étudiants, en particulier ceux issus de familles modestes, savent intuitivement ce que leur apporte l'institution scolaire. Elle leur enseigne à confondre les méthodes d'acquisition du savoir et la matière de l'enseignement, une fois que la distinction s'efface, les voilà prêts à admettre la logique de l'école: plus longtemps ils resteront sous son emprise, meilleur sera le résultat, ou encore le "processus de l'escalade" conduit au succès! C'est de cela que l'élève est "instruit" par les soins de l'école. C'est ainsi qu'il apprend à confondre enseigner et apprendre, à croire que l'éducation consiste à s'élever de classe en classe, que le diplôme est synonyme de compétence, que savoir utiliser le langage permet de dire quelque chose de neuf... Son imagination, maintenant soumise à la règle scolaire,se laisse convaincre de substituer à l'idée de valeur celle de service: qu'il imagine, en effet, les soins nécessaires à la santé, et il ne verra d'autres remèdes que le traitement médical; l'amélioration de la vie communautaire passera par les services sociaux -...- Santé, instruction, dignité humaine,indépendance, effort créateur, tout dépend alors du bon fonctionnement des institutions qui prétendent servir ces fins, et toute amélioration ne se conçoit plus que par l'allocation de crédits supplémentaires aux hôpitaux, aux écoles et à tous les organismes intéressés.
Je voudrais m'efforcer de montrer que cette confusion entretenue entre les institutions et les valeurs humaines, que le fait d'institutionnaliser ces valeurs nous engage sur une voie fatale. Nous allons inexorablement aussi bien vers la pollution du milieu physique que vers la ségrégation sociale, tandis que nous accable le sentiment de notre impuissance. -...- Il est clair que la recherche visant à définir les options du futur se contente le plus souvent de préconiser un enracinement plus profond des valeurs de ces institutions. Face à ce mouvement, il devient indispensable de rechercher des conditions différentes qui permettraient précisément au contraire de se produire. Il est donc grand temps de conduire une recherche à contre-courant sur la possibilité d'utiliser la technologie, afin de créer des institutions au service des interactions personnelles, créatrices et autonomes, et de permettre l'apparition de valeurs qui ne puissent pas être soumises aux règles des technocrates."
                                                               Ivan Illich, Une société sans école

Pour finir voici quelques extrait du "Maitre ignorant" de Jacques Rancière, que je vous recommande chaleureusement


"Il n'y a pas de hiérarchie de capacité intellectuelle. C'est la prise de conscience de cette égalité de nature qui s'appelle émancipation et qui ouvre la voie de toute aventure au pays du savoir. Car il s'agit d'oser s'aventurer et non pas d'apprendre plus ou moins bien ou plus ou moins vite"

"Se connaître soi-même comme voyageur de l'esprit, semblable à tous les autres voyageurs, comme sujet intellectuel participant de la puissance commune des êtres intellectuels".

"Maître est celui qui maintient le chercheur dans sa route, celle où il est seul à chercher, et ne cesse de la faire."

"Partout il s'agit d'observer, de comparer, de combiner, de faire et de remarquer comment l'on a fait. Partout il est possible cette réflexion, ce retour sur soi qui n'est pas la contemplation pure d'une substance pensante mais l'attention inconditionnée à ces actes intellectuels, à la route qu'ils tracent et à la possibilité d'y avancer toujours en apportant la même intelligence à la conquête de territoires nouveaux."

Au plaisir d'en discuter ensemble, à l'occasion, si l'envie de causer vous habite!

                                                                    Mathilde



Au passage, grand merci Sylvain pour le prêt éclairant de ces deux livres!

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